« Nous tous – dirigeants et citoyens – avons la responsabilité d’écouter et d’apprendre des survivants et des victimes en condamnant ces terribles crimes contre l’humanité, en nous efforçant d’éradiquer l’antisémitisme et toutes les formes de sectarisme, de haine et d’intolérance, et en trouvant une voie vers un avenir partagé, sûr et inclusif pour tous », a déclaré le chef de l’ONU, António Guterres.
« Ceci est particulièrement important dans le monde dangereux et divisé d’aujourd’hui, et quelques mois seulement après les horribles attaques terroristes du Hamas, dans lesquelles tant de civils israéliens innocents et de citoyens d’autres pays ont été tués », a-t-il ajouté.
À l’occasion de la Journée internationale de commémoration des victimes de l’Holocauste, célébrée chaque année le 27 janvier, la cérémonie s’est concentrée sur le thème de la reconnaissance du courage extraordinaire des victimes et des survivants.
Ne jamais baisser la garde
Le monde doit se résoudre à « s’opposer aux forces de la haine et de la division », a poursuivi M. Guterres.
La haine antisémite qui a alimenté l’Holocauste n’a pas commencé avec les nazis et ne s’est pas terminée avec leur défaite, a-t-il souligné, mais a été précédée par des milliers d’années de discrimination, d’expulsion, d’exil et d’extermination.
« Aujourd’hui, nous assistons à la propagation de la haine à une vitesse alarmante », a déclaré le chef de l’ONU. « En ligne, elle est passée de la marginalité au courant dominant ».
Pour lutter contre la haine, il a exhorté tout le monde à s’exprimer. « Ne restons jamais silencieux face à la discrimination et ne tolérons jamais l’intolérance », a-t-il dit. « Défendons les droits de l’homme et la dignité de tous. Ne perdons jamais de vue l’humanité de chacun et ne baissons jamais la garde ».
Vous n’êtes pas seuls
Outre son programme de sensibilisation à l’Holocauste, la stratégie et le plan d’action des Nations Unies sur les discours de haine définissent des orientations stratégiques aux niveaux national et mondial.
« À tous ceux qui sont confrontés aux préjugés et à la persécution, nous disons clairement : vous n’êtes pas seuls », a déclaré M. Guterres. « Les Nations Unies sont à vos côtés ».
« Aujourd’hui, plus que jamais, nous devons nous rappeler que la diabolisation de l’autre et le mépris de la diversité constituent un danger pour tous, qu’aucune société n’est à l’abri de l’intolérance, voire pire, et que le sectarisme à l’égard d’un groupe est un sectarisme à l’égard de tous », a-t-il dit.
« Les récits des survivants, puissants rappels à la vigilance »
Le Président de l’Assemblée générale des Nations Unies, Dennis Francis, a déclaré, dans un message vidéo préenregistré, que la promotion de la mémoire et de l’éducation concernant l’Holocauste est essentielle pour garantir que le crime de génocide ne soit jamais considéré comme normal ou justifiable en toutes circonstances et pour veiller à ce qu’il ne se répète jamais.
« Aujourd’hui, ceux qui ont tragiquement péri et les survivants sont la force puissante qui sous-tend tout ce que nous faisons aux Nations Unies pour préserver les générations futures du fléau de la guerre, pour promouvoir et défendre les droits de l’homme et pour œuvrer sans relâche en faveur d’un monde plus juste et plus pacifique », a-t-il déclaré.
Les récits des victimes et des survivants nous rappellent « notre devoir de lutter contre la haine et l’intolérance », alors que les discours de haine se multiplient dans le monde, avec une montée de l’antisémitisme et de la xénophobie.
« Nous ne pouvons et ne devons pas nous reposer sur nos lauriers », a dit M. Francis. « Aujourd’hui et chaque jour, nous devons nous réengager à dire plus que ‘plus jamais ça’. Nous devons vivre quotidiennement selon ce mantra ». « L’Holocauste doit à jamais être un avertissement pour nous tous afin que nous restions vigilants face à la haine, au racisme, aux préjugés et à l’intolérance qui se répandent », a-t-il ajouté.
‘Plus jamais ça’, « c’est maintenant », affirme Israël
L’Ambassadeur d’Israël, Gilad Erdan, a déclaré que l’attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre était une « tentative de génocide ».
« Nous, le peuple juif, comprenons mieux que tout autre peuple la signification du mot génocide », a-t-il affirmé. « Nous avons été persécutés pendant des millénaires. Hitler a gravé le sens du génocide dans notre ADN ».
Mais le 7 octobre, le Hamas a « ouvert cette blessure », a-t-il dit en tapotant l’étoile jaune qu’il portait à la boutonnière, insigne que le régime nazi obligeait les Juifs à porter.
« En cette Journée internationale de commémoration de l’Holocauste, je me tiens ici, au nom de l’État d’Israël, au nom de tous ceux qui ont été assassinés par les nazis et le Hamas, et je jure que nous n’oublierons pas. Plus jamais ça, c’est maintenant ».
La déshumanisation a permis l’Holocauste
Dans une déclaration commémorant la journée internationale, le Haut-commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH), Volker Türk, a déclaré que le monde avait le devoir d’examiner les raisons de l’Holocauste afin de s’assurer qu’il ne se reproduise jamais.
En effet, l’ampleur des crimes commis a engagé de nombreux auteurs, a-t-il souligné. Les camps de concentration et les trains de la mort nazis étaient dotés de personnel, et les victimes avaient souvent été identifiées par la police, par des personnes qu’elles connaissaient, a-t-il ajouté.
« D’innombrables passants ont détourné le regard – ou ont été indifférents – à ce qu’ils devaient soupçonner être une brutalité extraordinaire et inhumaine », a-t-il ajouté. « La déshumanisation qui a permis l’Holocauste – la profondeur et l’ampleur de cette absence d’empathie et de sentiments pour d’autres êtres humains – est incompréhensible et terrifiante ».
L’horreur du monde face à l’Holocauste a conduit directement à l’adoption de la Convention sur le génocide et de la Déclaration universelle des droits de l’homme, il y a 75 ans, et a contribué à l’adoption de la Convention européenne des droits de l’homme et d’une multitude de traités internationaux qui consacrent l’égalité, la dignité et les droits face à la tyrannie et à la misère, a déclaré M. Türk, ajoutant qu’il s’agit là de conventions, de principes et de valeurs qui doivent être défendus à jamais.
Le chef des droits de l’homme de l’ONU a estimé qu’il est « de notre devoir » de savoir comment ces crimes auraient pu être évités. « Si nous ne le faisons pas, ils pourraient se reproduire ».
Cérémonie de commémoration de l’Holocauste à l’ONU
La cérémonie de cette année a été organisée par Melissa Fleming, la Secrétaire générale adjointe à la communication globale, et a donné lieu à une série d’interventions, de témoignages de survivants et de spectacles.
Christian Pfeil, survivant de l’Holocauste, né dans le ghetto de Lubin en Pologne occupée, a partagé son témoignage sur la persécution des Roms et des Sintis.
Les sœurs Edith Tennenbaum Shapiro et Selma Tennenbaum Rossen, survivantes de l’Holocauste en Pologne, ont raconté leur histoire et le violoniste Doori Na s’est produit.
D’autres personnes ont contribué à l’événement, notamment Patra et Patrik Gelbart, qui ont chanté un morceau sur le peuple rom. Le chantre Daniel Singer a récité une prière commémorative.
Devoir de mémoire : la rénovation du Bloc 17 d’Auschwitz-Birkenau
À noter que la veille de la Journée internationale dédiée à la mémoire des victimes de l’Holocauste, la Bosnie-Herzégovine, la Croatie, la Macédoine du Nord, le Monténégro, la Serbie et la Slovénie ont signé un accord historique au Siège de l’UNESCO à Paris, pour la rénovation du Bloc 17 du Mémorial et Musée d’Auschwitz-Birkenau.
Fruit de quatorze années de négociations diplomatiques, il prévoit aussi l’installation d’une nouvelle exposition permanente commune sur l’Holocauste en ex-Yougoslavie et le sort des personnes juives et non juives déportées.
« Cet accord historique vient combler un vide, une absence de mémoire sur le site même où ces horreurs se sont déroulées », a déclaré la Directrice générale de l’UNESCO, Audrey Azoulay, affirmant que son agence est « fière de devenir la dépositaire de cet accord, en tant que gardienne vigilante de la vérité face à l’altération de la réalité historique ».
Selon Mme Azoulay, l’accord « témoigne de notre engagement commun à tirer les leçons du passé et à panser les plaies de l’histoire qui transcendent les frontières et les générations ».
Le Bloc 17 de l’ancien camp d’Auschwitz I a été construit en 1941 par ses détenus pour accueillir un nombre croissant de prisonniers du camp allemand nazi de concentration et d’extermination. À mesure que le mécanisme d’extermination s’accélérait, ses sombres murs devinrent un monument empreint de tourment et de désespoir. La plupart des 20.000 déportés de Yougoslavie sont passés par le Bloc 17.
A la suite de la décision du Mémorial et Musée d’Auschwitz-Birkenau d’abriter des expositions nationales, le Bloc 17 a accueilli le pavillon yougoslave en 1963. Il a été ferme après l’éclatement de la Yougoslavie et demeure vide depuis 2009.