Des experts indépendants de l’ONU ont recommandé, mardi, au Burkina Faso d’établir un mécanisme afin de vérifier les allégations relatives à l’existence de fosses communes dans ce pays du Sahel central.
Le Comité de l’ONU sur les disparitions forcées indique avoir reçu des informations sur l’existence de plusieurs fosses communes, notamment dans les villages de Karma et Djibo. À cet égard, le Comité note l’affirmation de l’État partie selon laquelle il n’aurait pas connaissance de telles fosses communes.
Dans ce contexte, alors même qu’il note les progrès mentionnés par l’État partie en matière de médecine légale et d’identification ADN, le Comité reste préoccupé par l’absence d’informations précises sur les efforts engagés en vue d’assurer l’identification, l’analyse médico-légale, le respect et la restitution des dépouilles des personnes disparues. Il s’est inquiété du manque d’informations sur les efforts déployés pour assurer l’identification et la restitution des restes des disparus et leur accès par toutes les victimes.
Allégations de disparitions forcées
Le Comité a donc demandé à l’État partie de veiller à ce que chaque charnier identifié soit préservé et examiné à l’aide de méthodes médico-légales.
Il s’agit également d’assurer que l’identification de toutes les personnes disparues soit spécifiquement et effectivement intégrée dans les missions et finalités de la police technique et scientifique et qu’elle soit accessible à toutes les victimes.
Par ailleurs, les experts onusiens se sont inquiétés des nombreuses allégations de disparitions forcées qui auraient été commises par les forces armées ou par des groupes armés, tels que les Volontaires pour la défense de la patrie (VDP), agissant sous le contrôle, avec l’autorisation ou l’acquiescement de l’État.
Tout en ayant pris note des assurances de l’État partie selon lesquelles la crise sécuritaire en cours ne revêtirait aucun caractère ethnique, le Comité reste préoccupé du fait que, selon les allégations reçues, les disparitions forcées viseraient principalement des personnes appartenant à l’ethnie peul ou perçues comme telles.
De plus, le Comité est inquiet des allégations récentes faisant état d’une pratique de disparition forcée ciblant des défenseurs des droits humains, des journalistes et des opposants politiques.
Le Comité exhorte donc à Ouagadougou de prendre toutes les mesures nécessaires pour veiller à ce que la disparition forcée ne soit pas commise par ses agents et d’enquêter efficacement sur toute allégation de disparition, poursuivre les responsables et, s’ils sont reconnus coupables, les condamner à des peines proportionnées à la gravité du crime. Il s’agit aussi de renforcer l’encadrement des VDP, afin de prévenir efficacement et de punir tout acte de disparition forcée qui serait imputable à leurs membres.
Mobilisation forcée
Le Comité s’est déclaré préoccupé par le décret relatif à la mobilisation générale et à l’alerte qui est susceptible de constituer des disparitions forcées.
Tout en tenant compte des informations fournies par l’État partie sur les garanties légales et les moyens de contester un acte de mobilisation forcée, les experts ont regretté que plusieurs pratiques mises en œuvre dans le cadre de l’application du décret N°2023-0475 portant mobilisation générale et mise en garde, sont susceptibles de constituer des disparitions forcées.
Le Comité a ainsi rappelé qu’aucune circonstance exceptionnelle, quelle qu’elle soit, qu’il s’agisse de l’état de guerre ou de menace de guerre, d’instabilité politique intérieure ou de tout autre état d’exception, ne peut être invoquée pour justifier la disparition forcée.
A cet égard, les experts indépendants onusiens recommandent aux autorités burkinabè d’assurer que les mesures prises pour lutter contre le terrorisme ne donnent lieu en aucun cas à des disparitions forcées, et que les familles des personnes recrutées soient systématiquement informées du lieu où elles se trouvent